TY - CHAP
T1 - Un rythe, un souffle (in)fidèles? La vocalité de Proust entre les langues
AU - Vago, Davide
PY - 2019
Y1 - 2019
N2 - [Fr:]D’après la phonostylistique, le vocal « est tout ce que la phonation peut produire lorsqu’on a déduit le verbal » (P. Léon). La voix humaine, amalgame singulier du corporel, de la parole et des traits psychologiques du locuteur, est souvent évoquée par les mots écrits d’une façon imparfaite, souvent par la voie indirecte (des périphrases). Or, si l’inscription du vocal dans l’orchestration langagière du texte littéraire est déjà une première forme de traduction – infidèle parce que nécessairement défectueuse, capable néanmoins d’activer toute l’inventio de l’écrivain – il se trouve que certains passages de la Recherche de Proust accordent aux traits de la voix humaine une importance fondamentale, inscrivant en effet un rythme primordial et ancestral dans l’écriture. C’est ce que nous appelons la vocalité maternelle, à partir d’un passage célèbre : la lecture nocturne de François le Champi (dans « Combray »), qui est aussi une véritable initiation à la littérature pour le jeune héros de la part de sa mère. Traduisant le rythmé vital, dans des phrases qui se caractérisent par une ventilation bien reconnaissable, en utilisant d’ailleurs toutes les gammes de la polysémie des termes comme « accent » ou « souffle », la vocalité maternelle devient alors un parangon stylistique pour l’écrivain, s’étendant à plusieurs personnages et à plusieurs niveaux dans l’œuvre de Proust.
Dans notre communication nous reviendrons sur quelques passages emblématiques (par exemple « La regarder dormir », dans La Prisonnière) afin de montrer comment l’écriture de Proust se nourrit aussi de ce modèle vocal par le biais d’une architecture lexicale et syntaxique permettant d’ancrer le souffle de la voix dans la page. Après avoir montré comment le « vocal » est à même de structurer certains passages choisis, nous nous proposons d’étudier la fidélité ou l’infidélité de quelques traductions de Proust (en anglais et en italien ) de ces mêmes passages, à travers le prisme de la sensibilité (ou de l’indifférence) des traducteurs à ce souffle original et originaire. Une mauvaise traduction serait en effet, d’après nous, celle qui dénature le rythme vital de la page proustienne, autrement dit une traduction qui ne serait pas respectueuse de la vocalité émergeant des mailles de la Recherche. Dans notre conclusion, nous reviendront sur l’idée qui si toute bonne traduction est bel et bien une herméneutique de l’œuvre littéraire, c’est parce que celle-ci fait apparaître son originalité à travers un « air de la chanson » bien reconnaissable, comme Proust écrit dans une page de critique littéraire : dans le cas de la Recherche, « l’équivalence sans identité » de la traduction (P. Ricœur) ne peut se passer d’une fidélité au vocal.
AB - [Fr:]D’après la phonostylistique, le vocal « est tout ce que la phonation peut produire lorsqu’on a déduit le verbal » (P. Léon). La voix humaine, amalgame singulier du corporel, de la parole et des traits psychologiques du locuteur, est souvent évoquée par les mots écrits d’une façon imparfaite, souvent par la voie indirecte (des périphrases). Or, si l’inscription du vocal dans l’orchestration langagière du texte littéraire est déjà une première forme de traduction – infidèle parce que nécessairement défectueuse, capable néanmoins d’activer toute l’inventio de l’écrivain – il se trouve que certains passages de la Recherche de Proust accordent aux traits de la voix humaine une importance fondamentale, inscrivant en effet un rythme primordial et ancestral dans l’écriture. C’est ce que nous appelons la vocalité maternelle, à partir d’un passage célèbre : la lecture nocturne de François le Champi (dans « Combray »), qui est aussi une véritable initiation à la littérature pour le jeune héros de la part de sa mère. Traduisant le rythmé vital, dans des phrases qui se caractérisent par une ventilation bien reconnaissable, en utilisant d’ailleurs toutes les gammes de la polysémie des termes comme « accent » ou « souffle », la vocalité maternelle devient alors un parangon stylistique pour l’écrivain, s’étendant à plusieurs personnages et à plusieurs niveaux dans l’œuvre de Proust.
Dans notre communication nous reviendrons sur quelques passages emblématiques (par exemple « La regarder dormir », dans La Prisonnière) afin de montrer comment l’écriture de Proust se nourrit aussi de ce modèle vocal par le biais d’une architecture lexicale et syntaxique permettant d’ancrer le souffle de la voix dans la page. Après avoir montré comment le « vocal » est à même de structurer certains passages choisis, nous nous proposons d’étudier la fidélité ou l’infidélité de quelques traductions de Proust (en anglais et en italien ) de ces mêmes passages, à travers le prisme de la sensibilité (ou de l’indifférence) des traducteurs à ce souffle original et originaire. Une mauvaise traduction serait en effet, d’après nous, celle qui dénature le rythme vital de la page proustienne, autrement dit une traduction qui ne serait pas respectueuse de la vocalité émergeant des mailles de la Recherche. Dans notre conclusion, nous reviendront sur l’idée qui si toute bonne traduction est bel et bien une herméneutique de l’œuvre littéraire, c’est parce que celle-ci fait apparaître son originalité à travers un « air de la chanson » bien reconnaissable, comme Proust écrit dans une page de critique littéraire : dans le cas de la Recherche, « l’équivalence sans identité » de la traduction (P. Ricœur) ne peut se passer d’une fidélité au vocal.
KW - Proust, Marcel
KW - phonostylistique
KW - rythme
KW - traduction
KW - vocalité
KW - Proust, Marcel
KW - phonostylistique
KW - rythme
KW - traduction
KW - vocalité
UR - http://hdl.handle.net/10807/145897
M3 - Chapter
SN - 978-88-8443-874-4
VL - 183
T3 - LABIRINTI
SP - 107
EP - 122
BT - Qu'est-ce qu'une mauvaise traduction littéraire?
ER -